Sabine est l'heureuse rencontre du hasard, Parce que les chemins heureux se croisent toujours plus d'une fois. La deuxième fois fut la bonne, je lui ai parlé de la blugture, et comprenant le principe elle a adapté ce billet qu'elle avait écrit pour son blog. Bienvenue Sabine et merci pour ta confiance.Il y a des films comme ça dont on se dit “il faut absolument que tout le monde le voit”. Je m’étais fait cette réflexion en sortant de La Zona en avril dernier. Dans La journée de la jupe les thèmes traités sont pourtant tout autres.
Une prof de français d’un collège de banlieue n’arrive pas à tenir classe. Elle est dépassée, ils sont intenables, nombreux, forts et il s’en foutent. Elle, a peur et se shoote aux anti-dépresseurs avant d’assurer son cours. La violence est partout dans le langage, les comportements, d’eux à elle mais aussi entre eux. Entrer dans la salle de théâtre du collège c’est entrer dans l’arêne, la fosse aux lions. Elle y va par devoir et veut continuer de faire malgré tout -malgré eux- son métier.
Elle pourrait plier, ses collègues le font bien, lui qui se laisse malmener et insulter par ses élèves sous prétexte de les comprendre, lui qui entre dans leur jeu en utilisant le Coran comme contre-argument aux réflexions et comportements inappropriés. Lui enfin, le proviseur, qui l’engage à ne pas porter de jupe car dit-il, dans ce contexte c’est un acte de provocation. Elle refuse de plier et se brise, inéluctablement.
Quand accidentellement elle se retrouve avec un flingue entre les mains, elle part en vrille : “Son dérapage la propulse, malgré elle, dans une véritable prise d’otages.“*
Alors dans le huis-clos qui les enferme, elle et une partie de sa classe dans cette salle de théâtre, elle force les verrous de sa relation aux élèves, défonce les portes qui les enferment. C’est en les menaçant de mort, que, difficilement, elle tentera d’établir avec eux une relation autre, de leur ouvrir une alternative à la violence, au sexisme, au racisme, et de faire entrer dans leur crâne touché par le froid métal du revolver que le véritable nom de Molière était Jean-Baptiste Poquelin.
Mon avis ? Un film émouvant et éprouvant. Violence des banlieues, difficulté d’y vivre, d’y grandir et d’en sortir, place de la femme dans cette société là et dans la société en général, enjeux de l’école publique et difficulté d’enseigner, racisme, religion, laïcité, respect. Des thèmes complexes, sensibles et difficiles à traiter, liés de façon inextricable dans ce film et qui font son intérêt, sa richesse et sa force. Pas étonnant que le réalisateur, Jean-Paul Lilienfeld, dise avoir fait “un film sur la corde raide”.
Isabelle Adjani (la prof), les jeunes acteurs qui jouent les élèves (notamment Yann Ebonge/Mouss et Sarah Douali/Farida), et Denis Podalydès (le négociateur) font particulièrement honneur au film. Et tant que je suis aux compliments, bravo aux producteurs d’avoir eu le cran de se lancer dans cette aventure.
Je le redis, La journée de la jupe est pour moi un film d’utilité publique, de ceux qui font avancer les réflexions et évoluer les consciences. Et qui participent à rendre le monde meilleur. Le film s'était vu restreint, faute de distributeur, à une sortie TV puis DVD. Diffusé sur Arte vendredi 20 mars, il a fait un record d'audience en battant même France 2 en parts de marché. La bonne nouvelle c’est qu'il est finalement sorti au cinéma le 25 mars.
La journée de la jupe, en salles depuis le 25 mars 2009.